
Dans un arrêt du 22 juin 2023, la Cour constitutionnelle s’est prononcée sur une question préjudicielle relative au calcul du traitement de référence pour une pension du secteur public (1er pilier).
Rappel : réforme de 2011 relative au traitement de référence
La période utilisée pour calculer le traitement de référence d’une pension de retraite du secteur public a été réformée en 2011 :
– Jusqu’au 31 décembre 2011 : une pension de retraite du secteur public était calculée en prenant en compte le traitement moyen des 5 dernières années de la carrière (ou de toute la carrière si elle était inférieure à 5 ans) ;
– Depuis le 1er janvier 2012 : le traitement de référence correspond au traitement moyen des 10 dernières années de la carrière (ou de toute la carrière si elle est inférieure à 10 ans).
– Une mesure transitoire a toutefois été prévue pour les personnes ayant atteint l’âge de 50 ans au 1er janvier 2012. Dans ce cas, le traitement de référence continue d’être calculé sur base du traitement moyen des 5 dernières années.
La question préjudicielle
La situation ayant donné lieu à la question préjudicielle peut surprendre de prime abord.
Il s’agissait d’un fonctionnaire respectant les conditions pour bénéficier de la mesure transitoire, et donc voir sa pension calculée sur base du traitement moyen des 5 dernières années.
Youpie ? … par forcément puisque devant le juge qui a posé la question préjudicielle, ce fonctionnaire contestait précisément le fait de bénéficier de la mesure transitoire.
En théorie, on peut s’attendre à ce qu’une pension calculée sur base du traitement moyen des 10 dernières années soit moins avantageuse que celle calculée sur base du traitement moyen des 5 dernières années.
Toutefois, dans le cas soumis à la Cour constitutionnelle, on comprend que le traitement de référence utilisé pour calculer la pension de retraite aurait été plus élevé (et donc la pension également) s’il avait été calculé sur base du traitement moyen des 10 dernières années
La question était donc de savoir si la mesure transitoire était compatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution (égalité et non-discrimination) dans la mesure où elle traitait de la même manière les personnes ayant atteint l’âge de 50 ans au 1er janvier 2012 peu importe l’impact sur la pension.
Qu’en dit la Cour constitutionnelle ?
Voici ce qu’on peut retenir :
- Il y a deux catégories de personnes : (1) les personnes qui ont atteint l’âge de 50 ans au 1er janvier 2012 pour lesquelles le calcul du traitement de référence sur une période de 10 ans serait plus avantageux et (2) ces mêmes personnes pour lesquelles le calcul du traitement de référence sur une période de 5 ans seraient plus avantageux ;
- Ces deux catégories sont traitées de la même manière : la disposition transitoire est applicable peu importe l’impact sur la pension de retraite ;
- Le critère utilisé est objectif : il s’agit d’avoir atteint l’âge de 50 ans au 1er janvier 2012 ;
- L’identité de traitement est pertinente compte tenu de l’objectif légitime et raisonnablement justifié de ne toucher ni aux droits acquis ni aux attentes légitimes des personnes concernées. Le fait que certaines personnes auraient pu tirer un avantage de la nouvelle définition du traitement de référence n’y change rien ;
- Aucun effet disproportionné dans l’application de la mesure transitoire : la réforme n’a pas modifié fondamentalement le traitement de référence (seule la période de référence a été modifiée) et la pension de retraite n’est pas uniquement déterminée sur base de ce traitement (la durée de carrière et le tantième entrent également en ligne de compte).
Conséquence ? aucune incompatibilité par rapport aux articles 10 et 11 de la Constitution (égalité).