Les aménagements raisonnables demandés doivent être en lien avec le handicap !

Dans un jugement du 19 avril 2022, le Tribunal du travail francophone de Bruxelles revient sur les critères que doivent remplir les aménagements raisonnables demandés par un travailleur en situation de handicap.

Les dispositions anti-discrimination prévoient que le refus par l’employeur de mettre en place des aménagements raisonnables sollicités par un travailleur handicapé est constitutif de discrimination, à moins que ledit refus ne soit légitime et proportionné.

Encore faut-il toutefois que les aménagements demandés soient en lien avec la situation de handicap.

C’est ce qu’a rappelé le Tribunal du travail francophone de Bruxelles dans un jugement définitif du 19 avril 2022.

En l’espèce, une travailleuse avait été licenciée en raison de la délocalisation dans un autre pays de la quasi-totalité du service comptable. Il n’était pas contesté que celle-ci avait un problème à la jambe et d’importantes difficultés de mobilité.

Au cours de son délai de préavis, la travailleuse avait sollicité de l’employeur (actif dans le secteur Horeca) la possibilité pour elle de continuer à travailler auprès d’un client à concurrence d’un jour par semaine ainsi que de commencer une formation pour être directrice de maison de repos.

L’employeur refusa ces demandes aux motifs que d’une part, la réaffectation chez le client n’était pas possible et que, d’autre part, la formation demandée constituait une difficulté organisationnelle importante et n’avait rien avoir avec l’activité de l’employeur.

Au terme de son préavis, la travailleuse réclama, entre autres, une indemnité pour licenciement discriminatoire estimant que lesdits refus étaient constitutifs de discrimination sur la base du handicap. Selon elle, l’employeur aurait dû tenir compte de sa mobilité réduite dans l’appréciation de ses demandes.

Dans son jugement, le Tribunal débouta la travailleuse en rappelant que : « même en cas de handicap, encore faut-il que les demandes d’aménagements raisonnables refusées par l’employeur soient en lien avec ledit handicap et susceptibles de rétablir l’équilibre avec les autres travailleurs, compte tenu du handicap concerné ».

Il considéra qu’en l’espèce, ces conditions n’étaient pas réunies.

« Les aménagements demandés ne sont pas liés à ses capacités réduites tels que des « aménagements de bureau, de sièges orthopédiques, la suppression de déplacement, etc. ». En outre, « les demandes sont intervenues suite à la suppression de son poste de travail ».

En effet, le seul aménagement demandé par la travailleuse lié à son handicap datait d’avant l’annonce du licenciement et consistait à pouvoir disposer d’une place de parking, demande à laquelle l’employeur avait accédé.

La particularité ici est que le Tribunal, pour appuyer sa position, rappelle l’article 2 du Protocole d’accord relatif au concept d’aménagement raisonnable conclu entre l’Etat fédéral et les entités fédérées qui contient les critères auxquels doit répondre l’aménagement raisonnable à savoir : l’efficacité, l’égalité, l’autonomie et la sécurité. La mesure demandée pour répondre à la notion d’aménagement raisonnable doit donc être efficace, permettre la participation égale et autonome de la personne handicapée et garantir sa sécurité.

Il semblait aller de soi que les aménagements raisonnables devaient être en lien avec ledit handicap pour donner lieu, en cas de refus, à une indemnité pour licenciement discriminatoire. Ce jugement et les considérations qu’il contient a le mérite de l’indiquer noir sur blanc.

Source : Trib. Trav. Bruxelles, 19 avril 2022, R.G. 21/28/A, inédit