En cette veille de vacances, bon nombre de travailleurs (secteur privé et secteur public) vont prendre leurs vacances. On le sait, selon la Cour de justice européenne, si un travailleur tombe en incapacité de travail durant cette période de vacances, il pourra toujours revendiquer ses jours de congés annuels perdus en raison de l’incapacité.
En effet, l’article 7 de la directive européenne 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail prévoit que tout travailleur doit pouvoir bénéficier d’un congé annuel payé d’au moins 4 semaines.
Or, ce droit au congé annuel ne peut être subordonné à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant une période de référence[1]. Par conséquent, même si un travailleur a été en incapacité de travail pendant toute une année, durant laquelle il n’est pas venu travailler, son droit au congé annuel ne disparaît pas pour autant. Les jours de congé ne sont pas perdus par le fait de la maladie et un travailleur a donc le droit de reporter son droit au congé annuel[2].
Quid si le travailleur est en incapacité de travail depuis de nombreuses années : peut-il capitaliser 4 semaines de congé annuel après chaque année d’incapacité et cumuler ces 4 semaines annuelles indéfiniment pendant toutes ses années d’incapacité ?
Non, selon la Cour de Justice de l’Union européenne, qui confirme dans un arrêt KHS du 22 novembre 2011 cette impossibilité de cumuler de manière illimitée le droit au congé annuel[3].
Quant à savoir durant quelle période le travailleur peut cumuler ce droit aux vacances annuelles indépendamment de son incapacité de travail, il revient à l’employeur de déterminer cette période en tenant compte du raisonnement suivant : la période au-delà de laquelle le travailleur perd son droit au congé annuel est-elle la période au-delà de laquelle le congé a perdu son effet bénéfique de temps de repos ?
La jurisprudence n’a pas chiffré de délai qu’elle considérait comme raisonnable, mais a toutefois posé une condition : toute période de report doit dépasser substantiellement la durée de la période de référence pour laquelle elle est accordée. Une période de 15 mois a déjà été acceptée.
Une chose est sûre : si la période de référence pour les congés est d’un an, la période de report ne pourra pas être inférieure à un an. Elle devra être « substantiellement » supérieure. Nous conseillons, au vu de la jurisprudence, ne pas descendre en-deçà de 15 mois. On pourrait donc imaginer une clause qui stipulerait que si les congés annuels n’ont pas pu être pris pour cause de maladie, le droit au congé s’éteint 15 mois après l’expiration de l’année civile.
Laurence Markey et Stéphanie Remy.
[1] CJUE, 20 janvier 2009, C-350/06 et C-520/06, affaire Schultz-Hoff et Stringer.
[2] CJUE, 10 septembre 2009, C-277/08, affaire Pereda.
[3] CJUE, 22 novembre 2011, C-214/10, affaire KHS, §§ 28-30.