Les délégués syndicaux suppléants qui ne remplacent pas un délégué effectif ne sont pas protégés contre le licenciement en vertu de la CCT n°5

C’est ce qui découle de l’arrêt de la Cour de cassation du 15 mai 2023, dans lequel elle se prononce sur les dispositions prévues par la CCT du 21.9.2015 fixant le statut des délégations syndicales, conclue au sein de la Commission Paritaire n° 311 (secteur de la grande distribution).

Conformément à l’article 18 de la CCT n° 5 du 24.5.1971 concernant le statut des délégations syndicales du personnel des entreprises :

« Les membres de la délégation syndicale ne peuvent pas être licenciés pour des motifs inhérents à l’exercice de leur mandat. »

La CCT n° 5 étant une CCT cadre, ses modalités d’application sont complétées par une CCT prise au niveau du secteur.

En l’espèce, l’affaire que la Cour de cassation a été amenée à trancher concernait une entreprise ressortant à la Commission Paritaire n° 311.

La CCT du 21.9.2015 fixant le statut des délégations syndicales conclue au sein de cette Commission Paritaire dispose que :

  • Article 6 : « Le nombre des délégués effectifs et suppléants qui composent la délégation syndicale est fixé comme suit (à partir de 1995) : (…) »

La partie demanderesse tirait argument de cette disposition que le délégué syndical suppléant devait être considéré comme un membre de la délégation syndicale, de sorte qu’il bénéficiait également de la protection prévue par la CCT sectorielle du 21.9.2015.

  • Article 26, alinéa 1er : « Les membres de la délégation syndicale ne peuvent pas être licenciés pour des motifs inhérents à l’exercice de leur mandat. »

Cet alinéa est identique à ce que prévoit l’article 18 alinéa 1er de la CCT n° 5.

La Cour de cassation a toutefois estimé qu’ « [i]l ne ressort ni de ces dispositions ni d’aucune autre disposition de la convention collective de travail que la protection instaurée par les articles 26 et 28 précités s’étendrait au délégué suppléant aussi longtemps qu’il ne remplace pas un délégué effectif. En déduisant des dispositions précitées que « [le défendeur], délégué syndical suppléant, peut […] invoquer en sa faveur [les] dispositions protectrices [des articles 26 et 28] », sans rechercher s’il remplaçait un délégué effectif, l’arrêt viole ces dispositions. Le moyen, en cette branche, est fondé. »

Cet enseignement est transposable à l’interprétation qu’il convient de faire de la CCT n° 5.

Source : Cass. (3e ch.) RG S.22.0038.F, 15 mai 2023 (JOUETS BROZE FILS / O. C.) (www.jura.be)