Protection de la maternité: attention, la protection peut courir au-delà du délai légal !

La protection de la maternité en cas de licenciement est bien connue tant des travailleuses que des employeurs. Elle est prévue par l’article 40 de la loi du 16 mars 1971 qui interdit à l’employeur, sauf pour des motifs étrangers à la grossesse, de faire un acte tendant à mettre fin unilatéralement à la relation de travail à partir du moment où il a été informé de l’état de grossesse jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois prenant cours à la fin du congé postnatal.

Une lecture rapide de cette loi peut laisser à penser qu’elle ne s’applique qu’au licenciement. Mais en réalité, la protection de la maternité couvre également tout acte préparatoire au licenciement qui serait posé par l’employeur pendant la période de protection, et ce même si le licenciement n’intervient que postérieurement à la période de protection.

La Cour du travail de Liège vient de rendre une décision intéressante illustrant ces principes.

Il s’agissait d’une travailleuse qui, bien qu’elle avait été licenciée en dehors de la période de protection de la maternité dans le cadre d’une restructuration, revendiquait une indemnité de protection au motif que l’employeur avait posé des actes tendant à mettre fin à son contrat de travail pendant la période de protection. En l’espèce, la travailleuse apparaissait dans la liste des personnes concernées par la restructuration établie pendant la période de protection.

Sur base de ce constat, la Cour va estimer que la protection était bien applicable et que l’employeur devait démontrer que le licenciement n’avait pas de lien avec l’état de grossesse.

L’employeur échouera à apporter cette preuve, et ce quand bien même il invoquait comme cause du licenciement la restructuration. En effet, la convention collective conclue à l’occasion de la restructuration prévoyait les critères de sélection des personnes à licencier et l’employeur invoquait que la travailleuse avait été licenciée sur base de plusieurs de ces critères, dont la mauvaise performance. La Cour estimera toutefois que l’employeur ne démontrait pas cette mauvaise performance.

La travailleuse réclamait aussi une indemnité pour discrimination sur base du sexe. La Cour constatant que l’employeur ne démontrait pas que le licenciement était étranger à l’état physique résultant de la grossesse ou de l’accouchement, elle le condamnera à une indemnité pour discrimination directe.

Cet arrêt est intéressant à de nombreux égards:

  • d’une part, il rappelle qu’une travailleuse reste protégée contre le licenciement au-delà de la période de protection s’il apparaît que des actes préparatoires au licenciement ont été posés pendant la période de protection;
  • d’autre part, une restructuration n’est pas toujours un motif étranger à la grossesse, et ce notamment lorsque l’employeur échoue à démontrer la raison du choix du travailleur à licencier;
  • enfin, indemnité de protection de la maternité et indemnité pour discrimination fondée sur le sexe sont cumulables.

Source: C. trav. Liège (div. Namur), 3 novembre 2022, RG 18/1147/A, juportal.be