Motif grave et exercice d’une activité complémentaire non-autorisée par l’employeur

Par jugement du 5 octobre 2020, le Tribunal du travail de Liège, division Liège, a eu à se prononcer sur la situation d’un Directeur financier, sous contrat de travail, qui exerçait une activité complémentaire indépendante de comptable. Contrairement au prescrit du règlement de travail, il n’avait pas demandé à son employeur l’autorisation d’exercer cette autre activité et ne l’avait par ailleurs pas averti.

Sans entrer dans les considérations de fait à la base de ce litige, le jugement du Tribunal rappelle deux principes importants à garder en mémoire lorsqu’une telle situation se présente.

Premièrement, le règlement de travail d’une entreprise peut tout à fait prévoir une disposition selon laquelle l’autorisation de l’employeur est nécessaire pour exercer une activité complémentaire. Dans le cas d’espèce, le travailleur invoquait qu’une telle clause était contraire à la liberté de travail. Comme l’indique le Tribunal, tel ne serait le cas que s’il s’agissait d’une clause d’exclusivité absolue sans possibilité de dérogation. Dans la mesure où l’exercice d’une autre activité est possible moyennant l’autorisation de l’employeur, il ne s’agit pas d’une entrave à la liberté de travail. Le Tribunal rappelle dans ce contexte qu’en cas de refus, la décision de l’employeur doit être raisonnable et se limiter à l’interdiction d’activités portant atteinte à l’exécution loyale du contrat de travail.

Deuxièmement, le Tribunal considère que l’exercice d’une activité complémentaire sans autorisation préalable de l’employeur, alors que celle-ci est imposée par le règlement de travail, est bien constitutif d’une faute. Cette seule faute n’est cependant pas suffisamment grave en tant que telle pour constituer de facto un motif grave de licenciement. Tout dépendra donc des circonstances l’entourant…

Précisément par rapport à ces circonstances, certaines sont de nature à conférer à la faute le caractère de gravité suffisant pour légitimer un licenciement pour motif grave. Particulièrement lorsque l’activité complémentaire est exercée pour le compte d’un concurrent, qu’il soit ou non démontré qu’un conflit d’intérêts ou qu’un conflit de loyauté se soit effectivement présenté. Le seul fait que l’employeur ait pu craindre légitimement qu’une telle situation puisse se présenter a grandement participé à la décision du Tribunal de considérer que l’exercice de l’activité complémentaire, sans avertissement ni autorisation, était constitutive de motif grave de licenciement. Par ailleurs, le fait que le travailleur ait eu connaissance d’informations sensibles et confidentielles propres à son employeur, eu égard à sa fonction de Directeur Financier, a également participé à l’appréciation du Tribunal selon laquelle il s’agissait bien d’un motif grave de licenciement.

Source : Trib. trav. Liège, div. Liège, 5 octobre 2020, R.G. n° : 19/1003/A.