Le Conseil National du Travail rend un avis sur la proposition de loi concernant l’envoi électronique des documents sociaux

Une proposition de loi du 13 septembre 2019[1] et amendée le 12 février 2020[2] concernant la numérisation des documents sociaux a été soumise à l’avis du Conseil national du Travail.

Cette proposition de loi part du constat que l’envoi des documents sociaux sur support papier est la règle. Vu les avantages qui pourraient être apportés par la numérisation de ces documents, la proposition a pour but de renverser le principe légal et de faire de l’envoi numérique la norme ainsi que de prévoir un système d’archivage électronique.

Les documents sociaux suivants sont visés par la proposition :

  • le compte individuel ;
  • l’état des prestations du travailleur ;
  • le décompte (visé à l’article 15, alinéa premier, de la loi du 12 avril 1965 concernant la protection de la rémunération des travailleurs) ;
  • le document que l’employeur est tenu de remettre à un travailleur amené à exercer son travail dans un pays étranger pour une durée qui excède un mois ;
  • le certificat que l’employeur est tenu de délivrer au travailleur lorsque son contrat prend fin et qui mentionne la date du début et de la fin du contrat, ainsi que la nature du travail effectué.

La proposition prévoit également que le travailleur a la possibilité d’indiquer à l’employeur qu’il entend qu’un ou que plusieurs des documents précités lui soient communiqués et archivés sous format papier. De même, l’employeur et le travailleur peuvent le déterminer d’un commun accord.

Dans son avis du 29 septembre 2020, le Conseil national du travail a entendu marquer son soutien quant à l’objectif poursuivi par cette proposition de loi. Il a cependant formulé certaines remarques quant aux modalités prévues dans la proposition :

  1. L’archivage électronique :

A l’heure actuelle, un service d’archivage électronique répondant au prescrit légal du Code de droit économique n’existe pas sur le marché des prestataires de service.

Le Conseil précise qu’afin de répondre à ces préoccupations, il s’engage à examiner s’il existe des alternatives viables au système de l’archivage électronique qualifié obligatoire.

2. La limitation du droit de demander l’envoi de documents sur support papier au seul travailleur et le risque de créer un double flux de communication (électronique et papier)

A titre préliminaire, le Conseil déclare que cette possibilité demande au travailleur d’avoir une bonne connaissance des documents dont il s’agit et qu’une politique en matière de numérisation doit accorder de l’intérêt à l’inclusivité numérique, afin de ne pas creuser les inégalités socioéconomiques existantes.

La dérogation prévue dans la proposition de loi est uniquement réservée au travailleur et pas à l’employeur. Autrement dit, l’employeur n’a pas la possibilité de déroger au principe général de l’envoi électronique ce qui peut constituer un problème pour les petites entreprises notamment qui emploient peu de personnel.

Ensuite, le Conseil pointe le risque d’un double flux de communication des documents notamment si certains travailleurs demandent une communication et un archivage des documents sociaux sous format papier, alors que cela se fait électroniquement pour d’autres travailleurs.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil recommande de prévoir la possibilité pour les deux parties au contrat de déroger à la règle générale de l’envoi électronique.

3. Modalités de réversibilité du choix des parties

La proposition ne laisse pas clairement apparaitre s’il est encore possible de modifier un accord mutuel convenu entre le travailleur et l’employeur.

Le Conseil estime que ce point doit être précisé et qu’il faudrait prévoir dans la proposition un principe de réversibilité, en vertu duquel les parties peuvent à tout moment revenir sur leur choix d’une communication électronique ou inversement.

Source : Avis n° 2178 du 29 septembre 2020 du Conseil national du travail sur la proposition de loi concernant l’envoi électronique des documents sociaux.


[1] Proposition de loi modifiant la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail et la loi du 3 juin 2007 portant des dispositions diverses relatives au travail en ce qui concerne la numérisation des documents sociaux (DOC 550319/001).

[2] Amendement n° 1 de Madame C. Fonck relatif à cette proposition (DOC 550319/002).