Les actualités du droit disciplinaire dans la fonction publique : Quelles sont les obligations de l’autorité disciplinaire dans le rapport de la preuve ?

Ce n’est plus à rappeler, une autorité disciplinaire doit pouvoir prouver les faits qu’elle considère comme étant des transgressions disciplinaires.  Oui, mais quel est le degré de certitude que doit revêtir cette preuve.  Le Conseil d’Etat, dans différents dossiers disciplinaires impliquant des policiers, se prononce sur l’obligation ou non des tests d’haleine et sur les conséquences de témoignages contradictoires sur l’établissement des faits. 

  1. Les faits

Durant ses heures de service, le policier, visé par la procédure disciplinaire a acheté et consommé de l’alcool, en l’occurrence de la bière.  Lors de cet achat et de cette consommation, il est en uniforme.  Il est interpellé par des collègues qui dénoncent un état d’ivresse.

Le policier en question reconnait expressément avoir consommé une bière dans le café mais il conteste, en revanche, son prétendu état d’ébriété.

Informé de ces faits, le collège de police ouvre une procédure disciplinaire et inflige au policier la sanction disciplinaire lourde de la démission d’office.

Un recours en suspension et en annulation est introduit par le policier contre la sanction de démission d’office imposée par le Collège de police.

2. La décision du Conseil d’Etat

Le premier moyen vise l’absence de preuve formelle de la consommation excessive ayant entrainé l’ivresse puisque celle-ci est fondée sur des témoignages peu précis, inexacts et contradictoire

Le Conseil, après avoir constaté que le policer reconnaît s’être rendu dans un débit de boisson et y avoir bu une bière déclare, rappelle tout d’abord que lorsqu’un policier est surpris en train de boire durant son service, l’autorité n’est pas obligée de procéder à un test d’haleine en vue de prouver l’imprégnation alcoolique. Cependant, l’autorité disciplinaire doit, lorsqu’elle prend une sanction qui retient l’ivresse, se fonder sur des éléments établissement à suffisance ce grief. Or et en l’occurrence, le Conseil d’Etat relève des contradictions dans les témoignages des policiers. Il considère que ceux-ci ne peuvent pas, à eux seuls, établir l’état d’ivresse et conclut donc que la matérialité des faits n’est pas suffisamment établie.

La suspension de l’exécution de la décision de démission d’office est prononcée.

3. Que retenir ?

Cet arrêt rappelle la jurisprudence constante du Conseil d’Etat qui considère qu’une autorité administrative ne peut s’appuyer que sur des faits établis avec certitude lorsqu’elle inflige une sanction et que la charge de la preuve repose sur elle.

Ainsi, lorsqu’elle fonde sa décision sur des témoignages contradictoires, ce principe n’est pas respecté.

Source : C.E., n° 243.379 du 11 janvier 2019, Huysseune ; Voyer également : C.E., n° 243.370 du 10 janvier 2019, Mouttalib et C.E., n° 243.266 du 18 décembre 2018, Platteau.