
Dans un arrêt récent du 22 janvier 2019, la Cour de Justice de l’Union européenne se penche sur la question de savoir si une réglementation qui octroie un jour de congé à une communauté religieuse constitue une discrimination directe sur la base de la religion.
- Les faits
La loi autrichienne, remise en question dans le cadre de la procédure, qualifiait le Vendredi saint de jour férié. Ce jour était donc octroyé et payé aux travailleurs membres de quatre Eglises (à savoir, les Eglises protestantes des confessions d’Augsbourg et helvétique, l’Église vieille-catholique et l’Église évangélique méthodiste). Cette législation énonçait également que ces travailleurs pouvaient prétendre au double de leur rémunération lorsqu’ils travaillaient le Vendredi saint.
Un travailleur, non membre d’une de ces quatre Eglises, qui a travaillé le Vendredi saint et n’a pas pu bénéficier de la double rémunération, remet en cause cette réglementation qu’il considère comme discriminatoire.
2. La décision de la Cour
La Cour de justice procède à l’analyse de cette situation en application de la directive 2000/78.
La Cour conclut à l’existence d’une discrimination directe sur la base de la religion puisque la loi autrichienne traite différemment les travailleurs selon leurs convictions religieuses en favorisant certaines confessions et pas d’autres.
Une fois le constat de discrimination posé, la Cour répond à la question de sa justification potentielle. Rappelons à cet égard que pour être justifiée la mesure doit être nécessaire en vue de préserver la sécurité publique, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, la protection de la santé et la protection des droits et libertés d’autrui. Elle doit également être proportionnée
La Cour conclut au fait qu’une telle législation ne peut être justifiée ni au titre de mesures nécessaires à la préservation des droits et des libertés d’autrui ni au titre de mesures spécifiques destinées à compenser des désavantages liés à la religion.
La Cour ajoute qu’aussi longtemps que la législation nationale n’a pas été modifiée, il incombe aux employeurs d’accorder également ce jour fériés aux travailleurs ne faisant pas partie de quatre Eglises ainsi que l’indemnité complémentaire en cas de travail.
3. Que retenir ?
- Qu’un employeur, ou un légiférant ne pourrait réserver des jours de congé supplémentaires ou des jours fériés en référence aux fêtes religieuses de certaines confessions. Une telle pratique serait discriminatoire
- Qu’un employeur ou un réglementant devra, lorsqu’il octroie un jour férié ou un jour de congé supplémentaire, veiller à poser des conditions d’octroi de ces jours qui ne soient pas discriminatoires ;
- Qu’un employeur ne pourrait refuser une demande de congé sollicitée par un travailleur, en-dehors de jours fériés ou de congés spécifiques, pour assister à une fête religieuse, sauf s’il a un motif légitime comme l’intérêt du service.
Thomas Lecomte et Laurence Markey
Source : C.J.U.E., arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation GmbH c. Markus Achatzi, Affaire C‑193/17.