Dans un arrêt du 19 janvier 2017, le Conseil d’état a eu à analyser sa compétence en matière de contentieux indemnitaire, l’occasion dans ce post, d’attirer l’attention sur cette compétence particulière et exceptionnelle du Conseil d’état.
Les faits de la cause peuvent être résumés comme suit : un agent de la Région Bruxelles capitale va exercer pendant près de douze années des fonctions supérieures. Elle bénéficiera durant toute cette période d’une allocation pour l’exercice de fonction supérieure. Elle ne pourra jamais être nommée dans les postes qu’elle occupera en cause des annulations multiples, par le Conseil d’état, des arrêtés déterminant les cadres linguistiques du personnel du Ministère de la Région Bruxelles-capitale. Oui mais, le temps de la retraite arrivé, la pension de cette agente de l’Etat est calculée sur la base de son traitement sans que cet exercice de fonction supérieure ne puisse être valorisé dans le calcul de la pension. Un manque à gagner donc qui conduit, l’agente à réclamer devant le Conseil d’état un dommage exceptionnel de 79.000€.
Après avoir rappelé les conditions posées par l’article 11 des Lois coordonnées, pour qu’une telle demande puisse être déclarée fondée, Le Conseil d’état analyse si, in casu, le fondement de la demande en réparation relève bien de sa compétence et ne résulte pas de la violation d’un droit subjectif. L’analyse s’effectue tenant compte du caractère résiduaire de la compétence. Le Conseil d’état va donc vérifier s’il existe une faute pouvant engager la responsabilité de l’autorité et donc fonder la compétence du pouvoir judiciaire. Il va estimer et conclure que les arrêts en annulation des arrêtés fixant les cadres linguistiques démontrent des « carence dans la mise en oeuvre des lois sur l’emploi des langues en matière administrative ». Le fondement de la demande porte bien sur la mise en cause de la responsabilité de l’autorité et le Conseil d’état n’est donc pas compétent.
Une occasion manquée certes mais pourquoi alors avoir saisi le Conseil d’état et pas directement le Tribunal de première instance? Mais en raison de la prescription bien sûr! Alors qu’une mise en cause de responsabilité sur la base de l’article 1382 du Code civil se prescript par 5 ans (à partir du moment où l’agent a eu connaissance du dommage et de l’identité de la personne responsable) tel n’est pas le cas de la demande en dommage exceptionnel porté devant le Conseil d’état (CC 9 décembre 2010, n°138/2010).
C.E. 19 janvier 2017, n°237.094