Controverses relatives à la clause de préavis – Questions préjudicielles posées à la Cour constitutionnelle

L’article 68 de la loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que de mesures d’accompagnement est une disposition transitoire réglant la computation de la première partie du délai de préavis des travailleurs engagés avant le 1er janvier 2014. 

Pour rappel cet article prévoit que, pour les employés dont la rémunération n’excédait pas 32.254,00 € au 31 décembre 2013 (employés dits « inférieurs »), la première partie du délai de préavis en cas de licenciement est calculée sur base des règles légales, réglementaires et conventionnelles en vigueur au 31 décembre 2013. Pour les employés dits « supérieurs » (rémunération > 32.254,00 € au 31 décembre 2013), la première partie du délai de préavis est fixée à 1 mois par année d’ancienneté entamée avec un minimum de 3 mois. Pour ceux-ci, il n’est donc notamment pas tenu compte des règles conventionnelles – et ainsi des éventuelles clauses avantageuses de préavis – en vigueur au 31 décembre 2013. 

Par jugement du 13 février 2018, le Tribunal du travail d’Anvers (div. Anvers) soumet à la Cour constitutionnelle deux questions préjudicielles relatives à l’article 68. 

La première question posée par le Tribunal interroge la Cour sur la conformité de l’article 68 avec les articles 10 et 11 de la Constitution (principes d’égalité et de non-discrimination) en ce sens que pour calculer la première partie du délai de préavis des employés dits « inférieurs », il est tenu compte des règles conventionnelles en vigueur au 31 décembre 2013 (et donc des éventuelles clauses de préavis) alors que tel n’est pas le cas pour les employés dits « supérieurs ».

La deuxième question posée par le Tribunal interroge la Cour sur une éventuelle différence de traitement entre les employés dits « supérieurs » selon que le contrat de travail de ceux-ci contient ou non une clause conventionnelle en vigueur au 31 décembre 2013. Il est en effet constaté que tous les employés dits « supérieurs » sont logés à la même enseigne (on ne tient pas compte des éventuelles règles conventionnelles pour le calcul du délai de préavis) alors que leur situation juridique n’est pas comparable. Certains font en effet état d’une clause conventionnelle, et particulièrement d’une clause de préavis valable leur garantissant une sécurité contractuelle relative au délai de préavis à respecter.  

Par l’application de l’article 68, il ne devrait cependant pas être tenu compte desdites clauses garantissant une sécurité contractuelle alors même que l’objectif de la disposition transitoire était de respecter les attentes légitimes des parties contractantes et d’augmenter la sécurité juridique. 

La validité des clauses de préavis contenues dans les contrats de travail des employés dits « supérieurs » fait l’objet de controverses depuis l’introduction du statut unique. 

Cette question est désormais soumise à l’appréciation de la Cour constitutionnelle. La suite au prochain épisode.  

Source : Moniteur Belge, 4 avril 2018.