Le travailleur peut-il couvrir la nullité d’un préavis irrégulier ?

La Cour du travail de Liège, division Namur, a eu à connaître du cas suivant: un employeur notifie verbalement à une travailleuse un congé assorti d’un préavis. En application de l’article 37 de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, ce préavis est donc nul car non communiqué par envoi recommandé ou par exploit d’huissier. Le congé, en raison de son caractère irrévocable et unilatéral, subsiste quant à lui.

A l’occasion de cette notification verbale, la travailleuse fait savoir à son employeur qu’elle ne désire pas prester son préavis mais qu’elle demande que celui-ci soit « comblé » par ses congés légaux et des jours de congé sans solde pour le surplus. Une convention reprenant ces termes est signée entre les parties.

Une semaine après la signature de cette convention, la travailleuse adresse un courrier à son employeur pour contester la forme du congé et pour solliciter le paiement d’une indemnité compensatoire de préavis. Ce n’est qu’après cette demande que l’employeur lui notifie un préavis par envoi recommandé. La travailleuse demandera également une indemnité pour licenciement abusif en raison de la violence morale exercée sur elle lors de la signature de la convention précitée.

L’employeur est condamné en première instance au paiement de l’indemnité compensatoire de préavis postulée et d’une indemnité pour licenciement abusif. Il interjette appel de ce jugement.

La Cour du travail raisonne comme suit. Le préavis notifié étant nul mais le congé subsistant, la travailleuse disposait à dater de la notification verbale de la possibilité de faire valoir son droit à une indemnité compensatoire de préavis. La problématique se cristallise autour de la question de savoir si, par la convention signée, la travailleuse a valablement renoncé à cette indemnité pour convenir d’autres modalités de rupture (i.e. la prise de congés légaux et de congés sans solde).

La Cour établit sur base des termes de la convention que c’est bien l’absence de prestation du préavis qui constitue la cause de la convention conclue. Cependant, dans la mesure où ce préavis est nul de nullité absolue et donc nécessairement sans effet, l’engagement pris par la travailleuse impliquant également la renonciation au paiement d’une indemnité, était sans cause ou reposait sur une fausse cause. La Cour conclut donc que l’accord renfermé dans la convention ne prive pas la travailleuse de son droit à une indemnité compensatoire de préavis.

Doit-on déduire que tout accord conclu après notification du congé est nul ? Certainement pas. Tout dépendra des éléments de l’espèce et des termes de l’accord conclu. On retiendra toutefois que cet accord ne pourra pas couvrir la nullité du préavis et qu’il conviendra d’être vigilant dans la rédaction de la convention.

Source : C. trav. Liège, div. Namur, 11 juillet 2016, R.G. 13/2238/A, http://www.juridat.be